
Journée internationale des cancers de l’enfant : notre rencontre avec les ministres de la santé et de la recherche
Chaque année, 2 500 enfants en France sont diagnostiqués d’un cancer. 20% d’entre eux n’ont aucune solution thérapeutique adaptée et 500 ne survivront pas. Face à cette situation, la fédération Grandir Sans Cancer et les parlementaires se mobilisent ensemble, tant pour la recherche que sur les aspects sociaux. Ces derniers mois, une proposition de loi, travaillée par les députés Charlotte Goetschy Bolognese et Vincent Thiébaut, avec la fédération Grandir Sans Cancer, a été votée à l’Assemblée nationale : elle vise à optimiser la protection et l’accompagnement des parents d’enfants atteints de cancers, de maladies graves et de handicaps. Mais son passage au Sénat reste en attente, pour être promulguée. De même, les parlementaires et sénateurs ont voté pour la mise en place d’un fonds de 15M€/an pour la recherche clinique sur les cancers de l’enfant. Un financement indispensable, qui avait malheureusement disparu, puis qui est réapparu suite aux interventions des députés et des associations membres de Grandir Sans Cancer. Le 14 février 2025, une rencontre a eu lieu à l’Institut Curie avec le ministre de la recherche Philippe Baptiste, et de la santé Yannick Neuder. Voici un point des attentes et de la situation…
Petit historique de l’actualité …
Un amendement, visant à allouer dès 2025 15 M€/ an à la recherche clinique sur les cancers pédiatriques (c’est à dire, la recherche au chevet de l’enfant), en plus des 5 M€/an alloués à la recherche fondamentale, avait été travaillé avec Grandir Sans Cancer et Eva pour la vie. Il avait été voté à l’unanimité à l’Assemblée nationale (présenté par Vincent Thiébaut en commission des affaires culturelles, puis en commission des finances par François Ruffin) puis au Sénat le 20 janvier dernier (présenté au sein de l’hémicycle par Elsa Schalck). Mais surprise, le 7 février nous apprenions que ces moyens avaient disparus, sans en comprendre la raison.
Une indignation collective, y compris des parlementaires, a rapidement suivi, relayée par une pétition qui compte depuis le dimanche 9 février plus de 20 000 signataires : https://www.change.org/p/15-millions-d-supprim%C3%A9s-nos-enfants-atteints-de-cancer-sacrifi%C3%A9s-par-le-gouvernement .
Face au tollé, des échanges ont rapidement eu lieu.
De nombreux médias ont relayé notre stupéfaction, partagée par les parlementaires qui ont rencontré, très rapidement, les ministres en apportant leur soutien à notre démarche. Finalement, le gouvernement a publié un communiqué de presse : « Le gouvernement s’engage à compléter de 15 millions d’euros le budget consacré à la lutte contre les cancers pédiatriques », une somme qui viendra « compléter les 60 millions d’euros supplémentaires déjà alloués à cette cause ».
C’était un premier pas, mais trop imprécis.
Les 60 millions d’euros correspondent à l‘investissement total de l’Etat depuis 2018 et non pas à des moyens annuels. En effet, 5M€/an sont fléchés pour la recherche fondamentale sur les cancers de l’enfant (depuis fin 2018), auxquels se sont ajoutés ponctuellement des moyens pour la structuration des équipes.
Le gouvernement indiquait donc que ce fonds verrait bien le jour en 2025. Mais quid des années suivantes ?
En effet, la mise en place d’un programme hospitalier de recherche clinique sur les cancers pédiatriques est un besoin récurrent et non pas ponctuel. Actuellement, il n’existe, pour la recherche clinique, qu’un financement général qui finance essentiellement les cancers de l’adulte, plus nombreux. Ces 5 dernières années, sur 177 projets de recherche clinique financés par l’INCA seulement 11 concernaient l’enfant …
Enfin, les aspects sociaux nécessitent aussi un soutien fort du gouvernement aux actions des parlementaires, travaillées main dans la main avec Grandir Sans Cancer.
La proposition de loi du député Vincent Thiébaut, visant à optimiser la protection et l’accompagnement des parents d’enfants atteints de cancers, de maladies graves et de handicaps, a été votée à l’unanimité (par tous les partis) en décembre, dans une atmosphère rarement aussi unie : un soutien du gouvernement accélérerait fortement son examen au Sénat, en vue d’une application rapide pour ses familles, pour les protéger face au crédit immobilier, pour prendre en charge le logement près de l’hôpital, les frais de stationnement, pour assurer une réponse de la MDPH dans les cas de handicaps sous 2 mois, ainsi que d’autres mesures très attendues par des familles qui souvent encore se retrouvent confrontées à la fois à la maladie grave, au handicap de leur enfant … et à la détresse sociale.
Ce jeudi 14 février, la fédération Grandir Sans Cancer et l’association Eva pour la vie étaient conviées par les ministres de la santé Yannick Neuder et de la recherche Philippe Baptiste, à un temps d’échange au sein de l’Institut Curie. Même si celui-ci a été rapide, il nous a permis de passer nos messages :
- Nous souhaitons la revalorisation du fonds public dédié à la recherche sur les cancers pédiatriques en le portant à 25 M€/an au lieu de 5 M€/an, afin de pouvoir y inclure la recherche fondamentale, épidémiologique et la recherche clinique oncopédiatrique. Cette position est fortement partagée, par les associations, 200 parlementaires et des professionnels dans une tribune parue dans Libération. Les chercheurs de l’institut Curie ont rappelé la nécessité de la continuité de cette recherche, qui va du laboratoire au chevet de l’enfant, et qui doit donc bénéficier de moyens dédiés. Les ministres semblent ouverts à cette possibilité. Des travaux sont en cours, avec une volonté de sanctuarisation, de pérennité qui reste à confirmer.
- Nous souhaitons le débat rapide au Sénat de la proposition de loi travaillée par les députés Charlotte Goetschy Bolognese et Vincent Thiébaut, avec la fédération Grandir Sans Cancer, visant à optimiser la protection et l’accompagnement des parents d’enfants atteints de cancers, de maladies graves et de handicaps. Le ministre a reconnu la nécessité de résoudre les problématiques sociales, qui peuvent fortement varier en fonction des territoires, de la situation sociale de la famille, et créer des inégalités de chances. Nous lui avons proposé d’intervenir afin d’accélérer ces débats, qui devraient aboutir à un vote majoritaire, voire unanime, au vu du consensus constaté autour de ces sujets par les parlementaires.
- Enfin, nous avons brièvement abordé la question du médicament pédiatrique. A ce jour, les grands industriels du médicament ne s’engagent sur le médicament pédiatrique que lorsqu’il constitue un marché suffisamment large. Si c’est le cas dans certaines pathologies courantes de l’enfant, c’est très peu le cas dans les cancers. Nous avons, avec Grandir Sans Cancer et des professionnels impliqués, avec des députés, travaillé une solution qui pourrait faire consensus si le gouvernement apporte son soutien.
Cette rencontre met en évidence un souhait commun, des ministres, des chercheurs et médecins, de Grandir Sans Cancer, de faire avancer les choses. Une partie du chemin a été parcourue depuis 2018. La balle est dans le camp des ministres afin d’aller jusqu’au bout, pour protéger ensemble ceux qui méritent le meilleur de notre pays : les enfants les plus vulnérables.